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La francophonie déconfinée : Montréal et Québec en apéro virtuel accueillent Rémi Villemure, conteur urbain

La francophonie déconfinée : Montréal et Québec en apéro virtuel accueillent Rémi Villemure, conteur urbain

Par Sophie Hamel-Dufour, Coordinatrice aux activités et partenariats de l'équipe de Québec (Francophonie sans frontières)

Que l’on soit au Sénégal, à Paris ou Montréal, la Covid-19 a bousculé le quotidien de millions de gens. Alors que le déconfinement se poursuit tranquillement dans plusieurs pays, nous souhaitions nous retrouver afin de prendre des nouvelles des équipiers de Montréal et Québec. Quoi de mieux qu’un apéro virtuel pour se revoir?

 

Lors de cet apéro nous avons eu l’honneur et le grand plaisir que le président de Francophonie sans frontières, Benjamin Boutin, se joigne à nous, tout comme le correspondant de l’Association au Sénégal Alpha Oumar Diallo.

 

Avec le confinement, pour plusieurs, le temps est devenu différent. De la course folle quotidienne, cadencée par l’instantanéité, brusquement, le temps est devenu autre. Avec le télétravail, moins de transport. Offrant plus de temps en famille. Ou plus de temps seul. Soudainement, nous avons eu du temps à meubler. C’est ainsi que, de par la francophonie, les initiatives se sont multipliées afin de proposer du cinéma, de la musique, des livres, des balados [podcast] en français.

 

Voilà d’où nous est venue cette idée d’un apéro virtuel : nous étions curieux donc de connaître les coups de cœur des équipiers pendant cette période hors du temps. Et question de se mettre dans l’ambiance de la découverte artistique, et de nous conter le temps différent avec la Covid, nous avons eu le grand bonheur de débuter la soirée avec les contes urbains de Rémi Villemure, jeune auteur diplômé de l’Institut National de l’Image et du Son de Montréal et créateur des Contes d’Hochelag.

 

 

Qui n’aime pas se faire raconter des histoires?

 

 

Avec une prose empreinte de l’intimité des personnages, et de ce français typique des quartiers populaires de Montréal, Rémi Villemure nous a raconté, en incarnant tour à tour ses personnages, le confinement vu par Sam, un jeune enfant jouant avec son frère dans le salon familial concluant que « Dans le fond, tout le monde est pogné dans son sous-marin ».

 

Nous amenant ensuite à la découverte du Quartier Hochelaga-Maisonneuve, nous sommes entrés dans un restaurant du type « le restaurant du coin » faire connaissance avec un monsieur, client régulier de l’endroit. Car après tout, il fallait bien sortir un peu :

 

« Le quartier est fermé, mais c’est pas une raison de rester chez moé. Je suis à la recherche d’un petit coin pour m’installer le temps que ça va durer. Je suis à la recherche d’une routine, d’un paysage qui se répète pis d’un peu de musique »

 

Les équipiers de Francophonie sans frontières ont pu échanger avec Rémi Villemure à propos de son processus créatif et son choix de la langue française pour créer.

 

Comment en vient-on à écrire sur la vie de son quartier?

 

Pour les 16 contes d’Hochelag, l’idée était de faire parler les gens de ce quartier populaire qui résiste à l’embourgeoisement. Les contes sont toujours écrits au Je afin que ce soit le personnage principal qui se raconte. Le quartier dont je m’inspire possède une tradition orale encore très forte. Quand j’y suis déménagé je suis tombé en amour avec ces histoires. Les contes me permettent de leur faire un clin d’œil.

 

Pourquoi choisir le français comme langue de création?

 

J’ai longtemps pensé que c’était un geste politique, habitant au Québec, dans une Amérique du Nord majoritairement anglophone. Puis j’ai réalisé que je suis simplement amoureux de cette langue. C’est une langue merveilleuse, qui a séduit d’autres peuples, c’est une langue sexy. Je n’oublie jamais le contexte politique, mais il s’agit pour moi de la revisiter, même de ne pas avoir peur de la brasser [la secouer].

 

Était une façon de donner une voix aux sans-voix, avec leur langue? Un peu à l’image des chroniques du Plateau Mont-Royal de Michel Tremblay?

 

C’est très flatteur la comparaison avec Michel Tremblay. Ce que Michel Tremblay a fait c’est probablement le dernier portrait d’un quartier populaire qui a énormément changé depuis. Dans 10 ans, dans 20 ans, Hochelaga-Maisonneuve ne sera plus ce qu’il est aujourd’hui. Il y a une forme de geste politique à donner la parole à des gens qui ne le peuvent pas. Dans ce quartier, il y a un haut taux d’analphabétisation. Quand tu n’as pas les mots, c’est difficile de se raconter, c’est presque impossible de l’écrire.

 

Quelles sont tes sources d’inspiration?

 

Même si spontanément on pourrait penser à Fred Pellerin, que je connais au-delà de la vie publique et dont j’admire l’œuvre, Fred n’est pas ma source d’inspiration. Je suis fan de François Létourneau, un créateur de séries télévisées au Québec qui m’a transmis la devise du travail en qualité et non pas en quantité, car les œuvres c’est ce que l’on laisse en héritage. J’aime également Jacques Ferron écrivain et dramaturge québécois. Mes références viennent davantage de la littérature, ce qui fait que les contes sont assez libres, en ne se rattachant pas à un courant ou à un autre.

 

Pour découvrir les Contes d’Hochelag :

 

Apple Music : https://cutt.ly/Gtdcu9U

 

Spotify : https://spoti.fi/2vgJt4x

 

YouTube : https://cutt.ly/JtdcyEr

 

 

Coups de cœur et découvertes des équipiers FSF

 

 

Le confinement a réellement offert des occasions de découvertes et des coups de cœur aux équipiers de FSF. Comme vous le verrez, la diversité des œuvres et des médias est au rendez-vous.

 

 

SÉRIES TÉLÉ

 

La télévision québécoise est reconnue pour ses caractéristiques distinctives. Les émissions et séries originales, écrites et produites au Québec sont très nombreuses. En dépit de la multitude des chaînes qui sont désormais accessibles, les Québécois demeurent fidèles à leurs artisans de la télé. Il n’est pas rare qu’une émission récolte des côtes d’écoute de plus de 2 millions de téléspectateurs pour une population d’environ de 6,3 millions de francophones[1].

 

 

Joanie Dionne-Réhaume (Québec) :

 

Son coup de cœur : la série « District 31 » qui plonge le téléspectateur dans l’univers d’enquêteurs attiré à un poste de police de quartier de la ville de Montréal. Énigmes et délits s’enchaînent en créant suspens après suspens. Parmi les grands succès télévisuels des dernières années.

 

Découverte : la série « M’entends-tu? » qui nous entraîne dans le quotidien de trois amies d’enfance issus de milieux défavorisés dont les histoires de vie douloureuses sont ponctuées d’amitié, d’humour. Une série empreinte d’humanité qui fait rire et pleurer. La série est désormais accessible sur Netflix dans 190 pays.

 

 

Gilles Grondin (Montréal) :

 

Coup de cœur : la série « La course folle » diffusée à Télé-Québec décrit sous un angle nouveau la réalité des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine, archipel logé dans l’estuaire du golfe Saint-Laurent. Pour les amoureux des accents, voici l’occasion de découvrir celui très chantant des Madelinots.

 

 

FILMS

 

Thibaut Temmerman (Montréal) :

 

Le confinement combiné au télétravail ont donné l’occasion à Thibaut de regarder des films sous l’angle de deux thématiques, celle « l’année 1962 » ainsi que celle de la peinture.

 

Coups de cœur : le film « La Jetée » de Chris Marker. Court-métrage de science-fiction utilisant la technique du diaporama avec qu’un seul plan filmé. L’histoire se déroule pendant la 3e guerre mondiale, alors que presque toute la vie sur Terre a été détruite. La mémoire prodigieuse du protagoniste principal est utilisée à des fins expérimentales afin de permettre la survie des humains. Année : 1962. Durée 28 minutes. Pour visionner le film : https://www.criterion.com/films/329-la-jet-e

 

 

 

Découverte : le film « Portrait de la jeune fille en feu » de Céline Sciamma. Voici un film où les jeux de regard parlent au-delà des mots. L’action se déroule au XVIIIe siècle, alors qu’une jeune femme refuse d’être peinte afin d’être présentée à son futur époux, car elle refuse ce mariage. Une jeune peintre deviendra sa dame de compagnie avec pour mission discrète d’arriver à faire son portrait. Entre les deux femmes naîtra un désir qui se butera à la morale de l’époque. Année : 2019. Durée : 120 minutes Pour visionner le film : https://www.universcine.com/films/portrait-de-la-jeune-fille-en-feu

 

 

 

BALADO [PODCAST]

 

Gaudérique Traub (Montréal) :

 

Coup de cœur : l’émission de radio « Fraîchement jeudi » diffusée sur les ondes de Radio Centre-ville à Montréal se consacre aux enjeux de la communauté LGBTQI2+. Tous les sujets sont abordés : de l’actualité, en passant par la santé, les arts et la politique. Dans le contexte de la pandémie, le directeur du Festival Fierté Montréal est notamment venu discuter de l’inventivité de la Fierté en mode virtuel.

 

Pour écouter l’émission de la semaine : https://radio-centreville.com/Emissions/fraichement-jeudi-2/

 

 

 

LIVRES

 

La vitalité de la lecture ne se dément pas au sien de Francophonie sans frontières alors que nous avons appris que Gaudérique Traub (Montréal) et Jean-François Rey (Montréal) prennent part à des clubs de lecture. Du côté de Gaudérique, l’auteure guadeloupéenne Maryse Condé lauréate du prix Nobel de littérature alternatif 2018 a été à l’honneur dans le Club de lecture de Franco-Caraïbe.

 

 

Benjamin Boutin (Paris) :

 

Coup de cœur : La biographie romancée d’Évelyne Pisier intitulée « Et soudain, la liberté » relate, à-travers une vie hors normes, le parcours de l’émancipation des femmes. Des colonies françaises à la France, en passant par Cuba, le lecteur est plongé dans un récit de vie touchant et vibrant où se côtoient des thèmes fondamentaux tels le racisme et la place des femmes. Plus touchant encore, Benjamin a eu l’immense privilège de rencontrer Évelyne Pisier. Éditeur Pocket.

 

 

 

Romain Lambic (Montréal) :

 

Coup de cœur : L’autobiographie de Thi Vân-Khanh Tong intitulée « Le journal de mon voyage vers l’ouest ». Cette lecture nous plonge dans le Vietnam des années 1970 alors que l’auteure prépare sa fuite avec ses enfants. Elle fera partie de cette vague importante de réfugiés que l’on appellera « Les Boat People ». Le livre peint son parcours, sa nouvelle vie à Montréal, remariée avec un Québécois, offrant aux lecteurs des conseils pour bien vivre sa vie au Canada. Chez Zone libre

 

 

 

Gilles Grondin (Montréal) :

 

Découverte : Récit historique de Gilles Havard « L’Amérique fantôme : les aventuriers francophones du Nouveau Monde » nous amène sur la piste des coureurs des bois qui ont sillonné le territoire de l’Amérique du Nord jusqu’au Mississipi. Réelle découverte de l’arrière-pays, des alliances nouées, de la mémoire autochtone, de la résonnance des noms francophones à partir de récits de voyage, d’archives de part et d’autre de l’Atlantique ainsi que des témoignages des descendants de ces explorateurs. Éditeur Flammarion Québec

 

 

 

René Villemure (Montréal) :

 

Découverte : Ouvrage à la fois, fascinant, aride et ontologique, « Les grammaires de la Création » de George Steiner plonge le lecteur dans l’univers du langage : sur le plan lexical, que s’est-il passé avec la Création? Pour lecteurs avertis. Gallimard

 

 

 

Sophie Hamel-Dufour (Québec) :

 

Découverte : L’artiste et journaliste Mohamed Lofti raconte dans son livre « Vol de temps : chroniques des années anonymes » trente années de radio entre les murs la prison montréalaise de Bordeaux. Trente années au cours desquelles plus de 20 000 détenus sur le chemin de la réhabilitation sociale ont pu échanger avec des personnalités de toutes horizons – ministres, artistes, sportifs, physiciens, anthropologues ou éthiciens – par le bais de la discussion, du chant, de la danse, de la musique, de la poésie. De leur poésie. Au cœur de ce projet que l’on pourrait trouver un peu fou (aux premiers abords), réside une foi profonde en l’être humain. Leméac Éditeur

 

 

 

Au sujet de Rémi Villemure

 

Rémi Villemure, jeune auteur diplômé de l’Institut National de l’Image et du Son de Montréal. Créateur des contes d’Hochelag, il travaille actuellement sur une pièce de théâtre qui sera présentée au Théâtre Saint-Denis à Montréal ainsi que sur un roman. Collaborateur à la revue L’Action Nationale, il vient d’être retenu en pré-sélection du Prix du Jeune Écrivain 2020. 

 

 

 

 

 



[1]Source : Rapport sur l’évolution de la situation linguistique au Québec. 2019. Office québécois de la langue française, p. 16 : https://www.oqlf.gouv.qc.ca/ressources/sociolinguistique/2019/rapport-evolution-situation-linguistique.pdf